2.22.2011

chroniques brésiliennes, le Brésil de dedans

On s’imagine le Brésil sous les cocotiers sur un fond coloré de plumes et de paillettes, de longues plages de sable blanc où des corps d’athlètes bronzés taquinent la balle comme des dieux … Mon Brésil est bien différent et vaut la peine d’être conté.

C’est le Brésil de « la roça », le far west sud américain où les cowboys modernes y côtoient les grands producteurs de soja.

Le paysage urbain des quelques villes qui parsèment des milliers de kilomètres de plantations est récent et encore un peu anarchique. Planté d’immeubles et quadrillé de rues grossièrement asphaltées, les grosses Chevrolets américaines y règnent en dictatrices.

Ici point de plage, l’Atlantique est a plus de 800 kilomètres, l’air est humide en été, les orages dantesques alternent avec des chaleurs suffocantes qui font fondre les rares piétons qui s’aventurent au milieu des klaxons. Le commerce de rue cependant est florissant en ces moments de boom économique insufflé par Lula et le grossissement d’une classe sociale qui découvre enfin l’American way of life. On y achète des écrans plasma en 12 fois sans frais, on y finance sa maison et sa voiture avec l’aide de l’ëtat qui s’est fait providence depuis que le pays est devenu le grenier du monde chaque jour plus gourmand. Le soja, le maïs, la canne à sucre et ici surtout, la viande, rapportent gros.

Capitale de l’amélioration de la race bovine pour l’industrie laitière ou carnée, l’agrobusiness est le moteur du triangle mineiro, une région de l'ouest de l'État du Minas Gerais, située entre les rivières rio Grande et rio Paranaíba, qui se rejoignent pour former le rio Paraná.

Point de shorts donc et de chemisettes bariolées, les hommes ici vont en jean, bottes en peau d’autruche et chemise impeccablement repassée. Il n’est pas rare de croiser un stetson pour parfaire l’uniforme du « fazendeiro » en goguette. Celui-ci écluse d’ailleurs des litres de bière le soir au coin du… téléviseur qui hurle les matchs de foot et les nouvelles du pays dans tous les établissement de la ville.

Les balades à la française sont difficiles à trouver, les espaces publics, parcs ou autres petits bois municipaux que mes compatriotes affectionnent pour flâner sur le chemin de l’école n’existent pas. Sécurité oblige, les sorties sont murées, les investissements exclusivement privés et les parcs bétonnés. Dans un pays où les hommes ont lutté pendant des générations pour dominer l’exubérante Nature, il semblerait qu’ils sont parvenus à l’éradiquer totalement.

En marge des fermes usines, dans le cœur des villes satellites des océans de plantation transgéniques, les autochtones sortent donc bien peu, le ronronnement des téléviseurs et des climatiseurs dans les hauteurs des immeubles dressés étouffent le peu d’énergie que le soleil aura laissé au citoyen et sa citoyenneté se répand sur son sofa, commande une pizza et referme le journal.

Attention, ne nous y trompons pas, la vie y est douce cependant. L’hospitalité brésilienne s’enrichie de la simplicité des hommes de la terre qui dans leur bonhommie vous font se sentir bien très vite. En trois générations, un brésilien descendant d’esclave devient ici universitaire . La classe laborieuse a ceci de magique, elle façonne son futur chaque jour à une vitesse que l’Europe ne peut connaître.

L’expérience est encore jeune et la réflexion ne demande qu’à mûrir, il s’agit là d’à priori et de sentiments bruts et premiers qui ne demandent qu’à découvrir plus et mieux un monde bien différent et fort prometteur.

Uberaba, février 2011

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